BOISVERT, Anne-Marie, « Les dérives du droit administratif : les régimes de sanctions administratives pécuniaires comme alternative au droit pénal », [2018] 23 C.C.L.R. 197-232
Résumé
Un nombre croissant de lois prévoient des régimes répressifs « alternatifs » au régime pénal traditionnel et sanctionnent les manquements à des lois destinées à protéger le public par des sanctions administratives pécuniaires. Ces sanctions peuvent être très importantes et on y recourt dans une multitude de domaines. Les tentatives de revendiquer l’application des garanties constitutionnelles offertes par la Charte dans ce domaine ont échoué au motif que le processus qui mène à ces sanctions n’est pas de nature criminelle et que ces sanctions ne constituent pas de véritables conséquences pénales. Les tests appliqués pour en arriver à ces conclusions sont centrés sur l’intention législative de faire respecter la loi plutôt que de punir et ne prennent pas en compte l’effet des sanctions sur le contrevenant. En définitive, la jurisprudence n’impose aucune limite au pouvoir de l’État de punir par voie administrative. On constate aussi que les décisions voulant que la Charte n’a pas d’emprise en matière de sanctions administratives ont entraîné l’abandon quasi-automatique, tant par les législateurs que par la jurisprudence, de certains principes directeurs ou de cohérence interne du droit pénal au moment de recourir à la sanction administrative de type punitif, ce qui fait douter de sa capacité à réguler les conduites. Le présent article fait la démonstration des incohérences et des injustices que cela entraîne et invite les tribunaux à revoir les critères élaborés par la jurisprudence afin d’encadrer l’action étatique.