Les grandes pionnières
La Faculté de droit de l’Université de Montréal a été fondée en 1878, mais il a fallu attendre cinquante ans avant qu’une première femme soit diplômée en droit. Il s’agit de Juliette Gauthier, licenciée en droit en 1928. Par la suite, de plus en plus de femmes se sont inscrites en droit et elles constituent maintenant environ les deux tiers des étudiants de la Faculté.
Une œuvre inspirante
Les professeurs Julie Biron et Jean Hétu, appuyés par la doyenne France Houle et avec la collaboration de Mike Berson, ont voulu rendre hommage à une vingtaine de diplômées qui sont des pionnières du milieu juridique en regroupant leurs photographies sur un mur de la Faculté. Ces précurseures ont, à leur façon, créé des précédents dont peuvent profiter les étudiantes d’aujourd’hui dans la poursuite de leur carrière juridique.
Les 20 grandes pionnières
Voici maintenant les vingt diplômées en droit dont la photographie se trouve sur le « Mur des pionnières » avec quelques mots de présentation pour expliquer ce choix.
Juliette Gauthier (LL. L. 1928)
Marie Léocadie Juliette Gauthier, née à Montréal le 3 septembre 1903, est la fille de Georges Gustave Gauthier et de Parmélie Parent. Inscrite à la Faculté de droit le 10 septembre 1925, elle obtient une licence en droit le 24 mai 1928. Elle épouse Richard Fleming, originaire de Carlton en Australie, le 28 août 1936 à l’église de la paroisse de La Présentation de la Sainte-Vierge dans la Cité de Dorval. En réponse à la question portant sur l’occupation de la mariée, le certificat de mariage mentionne « à la maison ». En effet, Juliette Gauthier ne pratique pas le droit puisqu’une femme ne peut à l’époque être admise ni au Barreau du Québec ni à la Chambre des notaires. Malgré cela, elle travaille pendant une année dans un cabinet d’avocats. Elle décède le 25 mai 1960 à l’âge de 56 ans et est inhumée dans le cimetière Notre-Dame des Neiges à Montréal. De son mariage sont nés quatre fils entre 1938 et 1944.
Henriette Bourque (LL. L. 1933 avec grande distinction)
Henriette Bourque est la deuxième et la seule femme inscrite à la Faculté de droit en 1931. Elle est licenciée en droit avec grande distinction en 1933 et première de sa promotion. Elle obtient de nombreux prix au cours de ses études : Prix Berthelot, Prix Sir Lomer-Gouin, Prix Mailhot, Prix Joël-Leduc, Prix Jetté-Campbell, Prix Larue et Médaille du lieutenant-gouverneur pour son excellence. Elle est la première femme à travailler comme avocate au ministère de la Justice du Canada en 1939, poste qu’elle va occuper jusqu’en 1949. Une plaque installée sur la rue Wellington à Ottawa, près de l’édifice du ministère de la Justice, rappelle ce fait. Née en 1903, elle est décédée en 1997.
Marcelle Hémond (LL.B. 1936)
Le 12 janvier 1934, Marcelle Hémond, aussi connue sous le nom de Marcelle Hémond-Lacoste en raison de son mariage en 1944 avec Me Roger Lacoste, est la troisième femme admise à la Faculté de droit. Elle obtient son baccalauréat en droit le 19 décembre 1936. Elle doit attendre cinq ans avant de pouvoir être admise comme avocate au Barreau du Québec le 15 janvier 1942. Elle est aussi la première présidente de l’Association des femmes avocates de la province de Québec (1954-1955) et la première femme nommée au titre de conseil de la reine (c.r.) en 1956. La salle Marcelle-Lacoste du CHU Sainte-Justine, dont elle a présidé le conseil d’administration, honore sa mémoire.
Suzanne Raymond (LL. L. 1939 avec distinction)
Inscrite le 12 septembre 1936 à la Faculté de droit, Suzanne Raymond, connue aussi sous le nom de Suzanne Raymond-Fillion, obtient une licence en droit avec distinction le 26 mai 1939 et se classe parmi les premiers étudiants de sa promotion. Elle est la quatrième femme diplômée de la Faculté de droit. Elle fait partie du groupe des quatre premières femmes admises au Barreau du Québec le 15 janvier 1942. Elle ne pratiqua pas le droit.
Pauline Cazelais (LL. L. 1945 avec grande distinction)
Licenciée en droit avec grande distinction en 1945, Pauline Cazelasi poursuit ses études en droit aux universités de Columbia (New York), Paris, et Oxford. Elle obtient un doctorat en droit de la Sorbonne de Paris. Elle est la première Canadienne à obtenir un doctorat en droit en 1949. Avocate, elle fonde en 1952 l’Association des avocates de la Province de Québec. Elle est aussi la cofondatrice de la Société des femmes universitaires de Montréal (1949). Elle décède le 8 septembre 2019 à l’âge de 96 ans.
Andrée Lajoie (LL. L. 1956 avec grande distinction)
Admise à la Faculté de droit le 8 septembre 1953, Andrée Lajoie obtient une licence en droit avec grande distinction le 23 mai 1956. Elle fait partie avec Robert Bourassa des quatre meilleurs étudiants de sa promotion. Elle poursuit des études à l’Université Oxford (M.A. 1963). À partir de 1962, elle est engagée par le Centre de recherche en droit public de l’Université de Montréal (CRDP). Elle devient professeure agrégée à la Faculté de droit en 1968, et professeure titulaire en 1972. Auteure de plusieurs ouvrages, elle est en 1976 la première femme nommée Directeur du Centre de recherche en droit public. Elle est probablement la première femme « chercheure de carrière en droit », ce qui lui a mérité de nombreux prix. Son nom apparaît sur la liste des professeurs émérites de la Faculté de droit.
Bérengère Gaudet (LL. L. 1959)
Admise à la Faculté le 8 septembre 1956, Bérengère Gaudet est licenciée en droit au mois de mai 1959. Assermentée le 11 octobre 1960 comme notaire, elle est la première femme à exercer cette profession au Québec qui est pourtant pratiquée depuis l’époque de la Nouvelle-France. Elle est suivie en 1963 comme notaire par deux autres diplômées de la Faculté, soit Paule MacKay (LL. L. 1962) et Rita Legault (LL. B. 1962). Bérengère Gaudet est aussi, en 1988, la première femme secrétaire générale de l’Université Concordia.
Lyse Lemieux (LL. L. 1961)
Admise à la Faculté en septembre 1958, l’honorable Lyse Lemieux obtient une licence en droit en octobre 1961. Elle est la première sous-ministre associée, affaires civiles et pénales, au ministère de la Justice du Québec en 1975. Par la suite, elle devient la première femme juge en chef de la Cour supérieure du Québec (1996-2004). Juge de la Cour supérieure pendant 26 ans, elle occupe le poste de juge en chef pendant huit ans, soit jusqu’au 30 septembre 2004.
Louise Mailhot (LL. L. 1964)
Admise à la Faculté en septembre 1961, l’honorable Louise Mailhot, O. Q., Ad. E., obtient une licence en droit au mois de mai 1964. Elle est la première avocate élue, en 1974, au conseil d’administration du Barreau du Québec. Elle est aussi la première plaideuse en droit du travail. Nommée juge de la Cour supérieure du Québec en 1980, elle est la première avocate du Barreau de Montréal nommée à la Cour d’appel du Québec à Montréal en 1987. Revenue à la pratique du droit, elle a été nommée avocate émérite du Barreau du Québec en 2007.
Michèle Rivet (LL. L. 1964 avec distinction)
Admise à la Faculté en septembre 1961, l’honorable Michèle Rivet, C. M., Ad. E., obtient une licence en droit avec distinction au mois de mai 1964. Elle est d’abord juge de la Cour du Québec (1987-1990) avant de participer en 1990 à la fondation du Tribunal des droits de la personne du Québec dont elle est la première juge-présidente jusqu’en 2010. Revenue à la pratique du droit, elle a été nommée avocate émérite du Barreau du Québec en 2015.
Huguette St-Louis (LL. L. 1968)
Admise à la Faculté de droit en septembre 1965, l’honorable Huguette St-Louis obtient une licence en droit au mois de mai 1968. En 1988, lors de la création de la Cour du Québec, l’honorable Huguette St-Louis est la première juge de nomination provinciale à occuper un poste administratif dans une cour de justice québécoise quand elle est nommée juge en chef adjointe, chambre civile. Elle occupe ce poste de 1988 jusqu’au 28 août 1996 alors qu’elle devient la première femme juge en chef de la Cour du Québec et présidente du Conseil de la magistrature (1996-2003).
Pierrette Rayle (LL. L. 1969 avec grande distinction)
Admise à la Faculté en septembre 1966, l’honorable Pierrette Rayle obtient une licence en droit en 1969 avec grande distinction. Elle se classe première sur les 169 étudiants de sa promotion et reçoit la Médaille du gouverneur général du Canada. Avocate, elle est la première femme associée dans le cabinet Fasken Martineau. Au mois de mai 1992, elle est la première femme élue au poste de Bâtonnier du Barreau de Montréal après 143 années d’existence. Elle est aussi la première femme présidente de l’Hôpital de Montréal pour enfants. Nommée juge de la Cour supérieure en 1995, elle devient le 1er octobre 2002 juge de la Cour d’appel jusqu’à sa retraite le 1er décembre 2008. Elle a créé la Bourse d’excellence Pierrette Rayle pour les étudiants de la Montérégie désireux de poursuivre leurs études en droit à l’Université de Montréal.
Hélène Dumont (LL. L. 1970)
Admise à la Faculté en septembre 1967, Hélène Dumont obtient une licence en droit en juin 1970 alors qu’elle se classe 9e sur les 203 étudiants de sa promotion. Professeure de droit pénal à la Faculté, elle devient en 1988 la première femme à occuper le poste de doyen de la Faculté de droit depuis sa fondation en 1878, ainsi que la deuxième dans l’histoire du Québec après Thérèse Rousseau-Houle nommée doyenne de la Faculté de droit de l’Université Laval en 1985, un précédent au Canada. Hélène Dumont est professeure émérite de la Faculté de droit.
Louise Harel (LL. L. 1977)
Admise à la Faculté en septembre 1974, Louise Harel obtient une licence en droit le 15 juin 1977. Femme politique, elle est notamment la première femme à occuper en 1998 les fonctions de ministre des Affaires municipales depuis la création de ce ministère en 1918. Elle est aussi la première femme présidente de l’Assemblée nationale du Québec du 12 mars 2002 au 4 juin 2003.
Annick Murphy (LL. L. 1979)
Admise à la Faculté en septembre 1976, Annick Murphy, Ad. E., obtient une licence en droit le 14 juin 1979. Elle poursuit une carrière comme procureur aux poursuites criminelles et pénales. Elle devient le 14 janvier 2015 la première femme à occuper la fonction de Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP). Elle est avocate émérite du Barreau du Québec depuis 2014.
Guylène Beaugé (LL. B. 1984)
Admise à la Faculté en septembre 1981, l’honorable Guylène Beaugé obtient un baccalauréat en droit le 7 juin 1984. Avocate d’origine haïtienne, elle est la première femme noire à être assermentée comme juge de la Cour supérieure du Québec en 2007.
Éliane B. Perreault (LL. B. 1984)
Admise à la Faculté en septembre 1981, l’honorable Éliane-B. Perreault obtient un baccalauréat en droit le 7 juin 1984. Elle est la première étudiante à devenir présidente de l’Association des étudiant(e)s en droit (AED) en 1983-1984. Procureure de la Couronne à Montréal, elle est assermentée juge de la Cour supérieure en décembre 2013.
Sonia LeBel (LL. B. 1990)
Sonia LeBel obtient un baccalauréat en droit de la Faculté en 1990. Procureure en chef de la Commission Charbonneau sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction, elle est par la suite élue députée aux élections générales du Québec de 2018. Elle est la première diplômée de la Faculté à devenir le 18 octobre 2018 ministre de la Justice du Québec, poste qu’elle occupe jusqu’au 22 juin 2020 alors qu’elle se voit confier d’autres responsabilités ministérielles.
Geneviève Bernatchez (LL. B. 1991)
Inscrite à la Faculté en septembre 1988, le commodore Geneviève Bernatchez, OMM, CD, obtient un baccalauréat en droit le 11 juin 1991. Elle est la première femme nommée au poste de Juge-avocat général des Forces armées canadiennes en juin 2017.
Yolande James (LL. B. 2000)
Yolande James obtient un baccalauréat en droit de la Faculté en 2000. Femme politique, elle est ministre du gouvernement libéral de Jean Charest de 2007 à 2012. Le 18 avril 2007, elle est la première femme noire à faire partie du Conseil des ministres du Québec.